(albrecht) la horde de deux

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S'il avait été un membre de la paroisse, c'est sûr qu'il aurait fait un super prêtre, Albrecht.
Toujours à accorder un pardon qu'il ne devrait pas aux plus coupables d'entre nous, à baisser les yeux, à tendre l'autre joue, à dire excuse-moi. On ferait ce qu'on voudrait de lui que ça ne changerait rien. Un petit peu comme la religion.

Il y a quelque chose de différent chez Merle ce soir. Quelque chose de plus abrasif. Albrecht ne sait pas vraiment dire de quoi il s'agit, pour ne l'avoir rencontré qu'une seule fois, ça peut tout aussi bien être un trait de personnalité que Merle ne lui avait pas partagé la nuit dernière.
Mais quoi que ce soit, ça a quelque chose d'effrayant qui presse le cœur de l'allemand. C'est le même sentiment qui vous habite quand vous fréquentez quelqu'un dont vous avez peur des réactions, parce que vous savez que vous n'en êtes pas à l'abri non plus.

Lame de couteau déployée vers lui, brillante d'un éclat qui ne demande qu'à se tâcher, soudain le cœur du blond se paralyse tout à coup. "... Quoi ?" Lui aussi il s'arrête de fumer, le bout de la clope qui fond en cendres dans le support prévu, tête qui finit par s'écraser totalement au fond.

- Eh ! Qu'est-ce que...
Qu'est-ce qui t'arrive ? Qu'est-ce qui se passe ? Qu'est-ce que c'est que ce canif dans ta main ? Qu'est-ce que tu vas faire avec ?
Il s'agit d'un peu tout ça à la fois qui se bouscule à la lisière de ses lèvres mais ils sont tellement nombreux à vouloir sortir en même temps que finalement rien n'émerge. Alors ça y est, même son nouveau copain en a marre de lui et veut lui zigouiller la gorge ?
Bah non, c'est pas ça non plus. Merle, il s'est levé de son séant pour rejoindre la sortie et plonger la salle dans le noir complet. Avant de retourner la pancarte de l'entrée.

Albrecht ne comprend tellement pas qu'il ne demande rien.

- Tu vas quand même pas chez ce type... T'es pas sérieux là ? Merle s'te plaît.
Et en même temps il hésite à en rajouter une couche parce que l'arme blanche pourrait tout aussi bien terminer entre sa carotide.
Ça sent encore la nicotine tout dans le videoclub au moment où ils sortent rejoindre l'étreinte du froid. Attends, on a vraiment le droit de partir comme ça ? C'est pas un peu immoral ?
- Je... je sais même pas où il habite ! Non déconne pas. Rentrons.

Un super prêtre, mais certainement jamais le Stallone salvateur des VHS.

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tu vas vite. trop vite. t’es habitué à tes basses fréquences, à ton énergie usée. des gestes lents. un esprit logique, des idées ordonnées. prendre le temps pour acquis et ne pas lui courir après. impossible que la docilité d’albrecht soit fautive, tu perdrais pas patience pour si peu. un autre jour, tu l’aurais simplement invité à prendre place à côté de toi, comme la dernière fois. t’aurais tenté de chasser son cafard avec la fin de cobra, aussi horrible eu été son visionnage.
il y a autre chose. une légère prise de conscience. tu penses pas tenir de ton père, mais c’est faux. les injustices vous irritent tout autant l’un que l’autre, que tu le veuilles ou non. t’aimes pas te mêler de ce qui te regarde pas, mais tu vas faire une exception ce soir. parce que t’as vu ce qu’on essaie de mettre sur le dos d’albrecht. c’est pire que ces chiens qui ont essayé de mettre le suicide de ta mère sur le dos de ton père, ou même sur le tient. c’est toi qu’on traite de fou quand ce genre d’individu arrive à pondre des théories aussi tordues?

tu craches sur le pavé. « t’inquiètes. » c’est ironique avec le ton grave que t’emploies en verrouillant la porte. t’as juste cette impression qu’essayer de le rassurer ne servirait à rien. le temps que vous avez passé ensemble te suffit, t’es certain de savoir comment il va réagir. t’as pas réussi à deviner quels genre de films il aimait regarder, mais en ce qui concerne le reste, l’allemand n’a rien d’un challenge. chacune de ses émotions se lit parfaitement sur son visage, presque comme un personnage de cartoon. « moi j’sais. » les clefs en poche, te voilà parti dans la même direction que la vieille cliente un peu plus tôt.
« ça fait combien de temps que t’es à stevenson al? » tu vas l’occuper, le distraire jusqu’à arriver sur les lieux. certes, la vengeance est le fuel qui te pousse actuellement à t’y rendre. mais t’aimerais également lui ouvrir les yeux et pour ça, il faut que t’arrives à le garder avec toi. tu crains de le perdre en route, qu’il t’échappe et que toi, tu dérapes.

mais t’as pris tes cachets. t’en es quasiment certains. il arrivera rien. inspires, expires, rallumes une cigarette. l’air froid soulage les braises que t’as au fond de l’estomac. et tu retrouves ton calme à chaque pas.

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"moi j’sais."

Merde, il sait.

Qu'est-ce que c'est, le souci de Merle, ce soir ? Tout à coup il réagit sous tension, la peau couverte de frissons, ses yeux qui abritent un nœud d'éclairs en colère. Albrecht, qui ne connaissait de Merle que son apathie et son manque d'expressivité, n'a pas les mots devant la métamorphose qui s'effectue droit sous ses yeux.

Porte de videoclub fermée à double tour, les voilà déjà en route, à fendre un bitume désert et plongé dans l'obscurité. Merle, il a toujours son couteau à la main, et ça, ça fait très peur à Albrecht.

- Merle attends...! Il va si vite. Te mets pas en danger bêtement, c'est pas grave ce qui s'est passé tu sais. C'est... C'est tous les jours comme ça, tu peux rien y faire.

Et s'il faisait quelque chose, ce serait pire. Les gens sauraient qu'il est lié d'une manière ou d'une autre aux Edelstein, et ce serait mauvais pour lui. Dans cette famille allemande, il est interdit d'avoir des amis. Parce que si on en a, on prend le risque de les perdre déjà.
Non, vous ne pouvez pas vous lier aux Edelstein, puisqu'un jour, la puanteur de leur sang finira par vous couler dedans.

Mais Merle, il s'en tape. Il demande même à Albrecht ça fait combien de temps, Stevenson.
- Bah... Depuis que je suis né pourquoi ?
On s'en fout non ? Albrecht ne comprend rien. Merle essaye de faire diversion ? Confus, le blond suit hâtivement les pas de Foster, craignant de le voir disparaître trop vite. De plus en plus ils se rapprochent de la périphérie de la ville, et un sentiment puissant d'inquiétude s'installe.

Alors que Albrecht reconnaît un pick up à la couleur rouge, garé près d'une bicoque à la peinture écaillée, il s'interpose devant Merle. Avec sa stature maigre et pas très impressionnante, difficile de redouter quoi que ce soit de lui. Mais au moins, il est à la hauteur de Merle maintenant.
- Arrête ! Il essaye d'avoir l'air en colère, mais ça ne marche pas très bien. Je t'en prie. Range ça...

Il pose ses doigts sur le poignet de Merle, dont les phalanges retiennent une lame prête à se salir. La vue fait déglutir Albrecht qui a peur d'écouter la violence qui éclatera bientôt s'il laisse Merle aller plus loin.

- Je veux pas perdre mon ami, pas déjà.

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» ein wütender Frosch [Albrecht]
» Bloody origins - Albrecht [tw : Violence, racisme]
» "Tant qu'il y a aura des cabanes au fond des forêts, rien ne sera tout à fait perdu" - [Albrecht]