chaotic good

les rues qui défilent tandis que son perce brise le silence de la nuit. les mains posées sur les manches, le corps couché dans ce pauvre cadis qu’il vient à pousser dans les rues de stevenson. ils pourraient réveiller les morts avec leurs rires et leurs enfantillages. cadis volé au supermarché sur la cinquième avenue, en dehors de la ville. les bras en l’air : regarde, je vole! sourire envolé dans la pénombre de la nuit tandis qu’il l’emmène au loin. les jambes qui suivent un rythme beaucoup trop rapide tandis que tout s’accélère. le paysage défile, les arbres se suivent et les voitures mal garées sont esquivés. on embrasse la nuit de nos lèvres chastes, nous la vivons. on s’abandonne sous un arbre, il la porte et la fait redescendre, la pose sur terre ferme : regarde, je divague! énième sourire volé, il acquiesce. cadis abandonné sur le bitume tandis qu’ils écrasent l’herbe de leurs derrières, gamin essoufflé tandis que la gamine tente de reprendre son calme. âmes trop enfantines pour ce monde, on s’oublie à coup de bêtises et de mauvais coups, on se perd dans le rire de l’autre, dans le regard d’autrui. les yeux qui fixent les étoiles, main posée sur sa poitrine alors qu’il souffle et reprend doucement sa respiration. sa tête bascule vers la gamine : c’est le plus beau tableau qu’il s’est donné d’observer. le regard timide, il s’échappe lorsqu’elle se tourne vers lui : regarde, regarde-moi! non, jamais je n’oserai! il s’abstient d’observer ses traits éclairés par la lune, préfère ignorer son regard pesant sur sa personne tandis que les yeux se ferment, presque scellés, tandis qu’un sourire se dessine sur ses lippes. doucement, une main se glisse dans la sienne. celle qui arrachait les brins d’herbes en silence est maintenant accaparée par cette main étrange — mais l’est-elle vraiment, étrangère ? l’enfant, que dis-je! l’adolescent, se mordille la lèvre. silhouettes qui resteront ainsi encore quelques minutes, peut-être même des heures ? le temps passe trop vite. la nuit leur appartient. après s’être lâché, après quelques regards timides, ils repartiront à leurs aventures trop médiocres pour être qualifié comme étant mature. ils graviront les échelons de la bêtise, s’écorchant les genoux et se perdant sous les étoiles de stevenson.
dieu que c’était beau,
cette insouciance.

tout le monde est parti. écrit sur une page vierge de sens, de mots ou d’encre. tout le monde est parti et je suis seul. le coeur se serre tandis qu’il lâche son stylo-billes et qu’il y repense. ce n’est pas son genre d’écrire ses pensées, mais c’est un conseil de sa mère qu’il s’est décidé à suivre. sauf qu’il pense que maman a tort et que ça ne servira à rien. parce qu’il n’a pas l’âme d’un auteur, ni celle d’un poète. il n’écrit jamais, préfère l’action aux mots. sur sa page anciennement vierge, il y lit ces deux phrases. celles-ci ont le pouvoir de faire serrer son coeur. il y pense, à ces demoiselles, à ces messieurs. ils sont tous partis et lui est là, dans sa belle et vieille stevenson. ils l’ont laissés, certains sont restés, mais ne sont plus là en même temps. l’impression d’être seul et vide, l’impression de ne pas avoir été assez pour les retenir. sa jumelle, ses proches, ses amis, même ses ennemis. seul face à son bureau, il y repense et dieu que ça fait mal de pas se sentir suffisant. c’est drôlement douloureux, si bien qu’il tente de nier cette douleur en quittant sa chambre. il terminera dans le salon, assis sur le canapé, mains posées sur ses cuisses. vide de sens, cette vie presque absurde.
cette insousiance disparue,
celle qu’il regrette.


la nuit comme unique amante, il la redécouvre aux côtés d’une belle. les mains sur le volant, au revoir le cadis. la musique qui bat son plein dans la petite boîte de fer qu’est sa bagnole. on roule pour oublier, on roule pour s’oublier. balade nocturne comme il les aime, il observe les collines le regarder de haut. il regarde les étoiles qui veillent sur lui, la lune qui cajole son coeur solaire. en cette nuit, tout est si beau. fresque pour laquelle il pourrait s’éprendre pendant des heures, amoureux d’un schéma longtemps oublié. seulement, coup de griffes dans ce tableau parfaitement peint. le corps bousculé quelques mètres plus loin, la panique qui prend possession du corps d’un garçon et d’une gamine qui n’avait rien demandé. elle a surgit de nulle part, ou peut-être était-ce un il, il n’en sait rien. les souvenirs de cette nuit sont aussi vifs que troubles, mais il se souvient de sa marche arrière et de sa fuite. des mouvements et des paroles paniquées de sa compagne, de leur fuite commune, d’un secret partagé. et encore, ce corps abîmé sur le bitume qui le hante. elle, confirmée plus tard, le hante.


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