(easter day) après la pluie, le beau temps.

Télégrammes : 84 Date d'inscription : 14/02/2020

Festivités de Pâques

Ils ont attendu ça toute la semaine : la signification même de l’expression « après la pluie, le beau temps ». Les bénévoles de la paroisse ont passé plusieurs jours à tartiner des œufs de chocolats avec des colorants alimentaires : le résultat est chimique, mais flamboyant. Après un débat houleux entre les quelques bénévoles de la paroisse – enfin, aussi houleux qu’un débat autour d’œufs de Pâques puisse l’être - on a fini par se mettre d’accord sur une distribution plutôt qu’une chasse à l’œuf : il ne faudrait pas que des petits malins repartent avec l’ensemble du butin…

Après la messe de 10h, les habitants de Stevenson sont donc invités à se rendre sur le parvis de l’Eglise pour récupérer leurs friandises. Pour faire plaisir aux marmots, quelques œufs en chocolat ont été disséminés autour du bâtiment… à moins que cela ne soit l’œuvre d’un vrai lapin, qui sait !

Pour plus de rapidité et de fluidité, n'hésitez pas à poster des messages courts et rapides, et à utiliser la fonction "@" pour mentionner vos interlocuteur.ice.s avec plus de clarté!
Et un grand merci tout particulier à @Candy Allen pour la rédaction de cet événement et à la communauté de la Paroisse pour son organisation, vous gérez (easter day) après la pluie, le beau temps. 4179205764

(easter day) après la pluie, le beau temps. 4179205764

Joyeuses Pâques à tous, que les cloches vous soient favorables (easter day) après la pluie, le beau temps. 3057934788

A choisir entre Noël et Pâques, je choisissais sans aucune hésitation Pâques. Vous voyez, j’avais toujours plus d’affection pour les renaissances que les naissances. C’était tout excité comme une puce que je me dirigeais vers ma paroisse. J’avais l’impression d’être un gars un peu important. Je m’étais proposé de décoration et le fils du pasteur aussi. Il s’appelait Ephraïm je crois. Dans ma tête, c’était surtout le fils du pasteur, et pour ça, je l’enviais. Mes parents vendaient des canapés, son père vendait le salut divin sur notre Terre de pêcheurs.

Avec mon sac à dos, j’avais pris mes bocaux au cas où. Le printemps arrivait lentement, et certaines espèces étaient observables plus facilement à la sortie de leur hibernation. Je ne perdais pas le nord. D’autres avaient prévu les courses de chocolat. Si ça n’avait tenu qu’à moi, je les aurai dégagé. Dieu était un papillon, un poisson ou du vin, et non pas du putain de chocolat. L’Amérique n’était pas connu pour son cacao, et cette sale tradition m’agaçait.

J’arrive à l’Église et je vois le Fils. Je souris, peut-être que je devrais pas parce que ça me fait une drôle de tête des fois. Je suis assez content, parce que réellement je l’admire. Il croit beaucoup en Dieu, et c’est rare de nos jours. Les jeunes de mon âge ne suivent plus rien, et la foi divine était la seule chose pure en ce monde. Je rêvais de l’absorber pour soigner mon sang, mais que dalle. J’attendais un miracle. Je reste devant lui, un peu gêné parce que je sais pas quoi dire. Du coup mes mains se rassemblent nerveusement et se tordent les doigts, à défaut de faire quoique ce soit d’autre. Au bout d’un moment, j’ose un :

« … On y va ? Y a un agneau à peindre je crois … Et des petites cloches à mettre … Et des rubans et … Ton père a prévu quelque chose ? Il est où ? Il est content qu’on soit là ? Je suis sûr que oui ! »

Je m’emballe, parce que j’aime beaucoup notre Pasteur. Je lui ai jamais dis les bêtises que j’avais faite, parce que je préfère en parler à Dieu le papillon. Peut-être un peu trop enthousiaste, je me précipite à l’intérieur et descend pour chopper les pots de peinture et commencer à peindre.

@ephraïm woolf hoplé !!!!

Jour funeste du calendrier.
Pas profane certes.
Mais un peu morose ce lever de soleil.
Pourquoi cette apathie ?
Pourquoi sentir un poids dans le creux des omoplates ?
Jour de Pâques et tête d’enterrement.
Il ne doit pas surjouer la joie ni la condamner sur son visage.
Des esquisses devant le miroir.
Des ébauches de sourire.
Pas crédible Ephraïm.
On sent bien l’épreuve à venir.
Le regret de passer une journée trop proche du Père.
Malfaisant.
Sadique.
Besoin d’y échapper.
Besoin d’un miracle.
Douche gelée.
Il aime le froid sur la peau.
Les sens plus exacerbés.
Le flux anesthésiant.
Il faut maintenant desserrer les dents.
Enlever les censures.
Faire comme si tout allait pour le mieux.
Meilleur des mondes.
Le soleil ne cache pas son bonheur, lui.
Devant l’église, il aperçoit Ambrose qui accourt.
Toujours à s’agglutiner près de lui.
Ephraïm ne comprend pas cet engouement.
Le rouquin fait une crise d’hystérie.
Cela lui ressemble bien.
Peu adepte de parader au milieu des braves,
Ephraïm lui intime de le suivre à l’intérieur.
Son acolyte a déjà des pinceaux dans les mains.
- Mon père…euh…
Le sermon sur la renaissance et le tralala ?
Il ne sait pas ce qu’il a prévu, sûrement le discours le plus plombant du monde.
Il saura égayer l’assemblée.
Mais pas ses propres fils.
De belles paroles en l’air si je puis dire.
Pour ne pas décourager son compagnon, il élude sagement.
On ne parle pas de lui, un point c’est tout.
- Attelons-nous à cet agneau.
Détournement.
Pancarte géante pour que chacun puisse y inscrire une prière, un vœu.
Quelque chose de chaste.
Un geste de bonté.
Que pourrait-il écrire Ephraïm ?
Que Papa redevienne un gentil ?
Le fils du pasteur commence à peindre, tentant de ronger son frein.
- Je voulais te demander…pourquoi es-tu si…si passionné par le pasteur ? Et…et moi ?
On ne peut pas ne pas remarquer.
Ambrose n’est jamais bien loin.

@Ambrose Atkins

Spoiler:

Considérons Stevenson comme une micro-communauté, où tout le monde entier tournerait autour. Il était absolument évident que le pasteur représentait Dieu, et Ephraïm Jésus. Stevenson comportait beaucoup de Jésus, et peu de gars aux cheveux longs. Les Woolf étaient une grande famille. J’ai été éduqué dans un cocon très croyant, pas étonnant qu’à la sortie, je veuille monter au ciel pour voir qui c’était, ce Dieu. Il était toujours sympa avec moi, lui. Pendant que je peins l’agneau, j’essaie de casser le blanc. Sûrement qu’un agneau sans ombre, c’est triste. J’ignorais à ce moment-là que j’étais sûrement en présence de la représentation de tous les agnus dei du monde. Inconsciemment, je peins un peu plus d’ombre au niveau des oreilles de l’agneau, au fond de son crâne.

« Sans vous, la paroisse existe pas. »

Je suis sincère quand je dis ça. Je les admirais car ils relevaient cette ville des pêcheurs. J’avais envie d’être leur fils spirituel également. J’aimais ma famille pour leur soutien financier, mais ils ne pardonnaient rien. Ils connaissaient la honte, le rejet, et je connaissais le pêché et la maladie. J’avais peur chaque hiver d’attraper un rhume. Je pourrais mourir de tout. J’étais tétanisé de mourir.
J’étais une sorte de sale héros romantique qui pourrait dire que l’amour m’a littéralement tué. Le soucis, c’est que personne allait le savoir, à part mes chenilles. C’était ridicule.

« Vous guidez les gens vers la lumière … The Star of the Sea Parish resplendit grâce à vous ... » Je me mords la lèvre, un peu amer. « Finalement, on est tous vos enfants spirituels … Je pourrais presque vous envier. »

J’imaginais pas le pasteur renier son fils car trop bête de se prendre un mur en bagnole. Sûrement qu’il m’aurait fait prier et qu’il aurait remonté la couverture jusqu’à mon nez quand j’allais au lit. J’aurai aimé avoir des histoires de martyrs héroïques avant d’aller me coucher, et non pas des sales contes allemands dont tout le monde s’en fout. Je déglutis et je regarde le Fils de Dieu. Avec la lumière de l’Église, je pouvais presque distinguer une couronne de lumière autour de sa tête.

Délire fanatique, écart hypnotique, lueur d’espoir.

« Vous êtes purs. »

Je pouvais pas être Jésus. Buvez mon sang, il est contaminé.

On finit l'agneau, et Stevenson pouvait commencer à venir pour s'installer pour la messe pascale.

Spoiler:

Un fanatique, il en faut au moins un.
Ce ne sera pas Ephraïm.
Il ne se courbera pas trop.
Peur que sa foi ne le submerge.
Il a des expériences à faire.
Science de la condition humaine.
Il veut aussi rire dans les champs avec des garçons.
Apprendre à coudre et nager avec des filles.
- Ne m’envie pas trop Ambrose.
Tu ne sais pas les terreurs nocturnes.
Tu ne sais pas la boule au ventre avant de rentrer.
Tu ne sais pas que le Diable réveille les innocents chaque nuit.
Tu ne sais pas ce qu’il fait dans ton dos tourné vers la lumière.
- Je ne veux pas te décevoir. Mais les apparences sont parfois trompeuses…
Des propos mystiques.
Le Seigneur et ses impénétrables pensées.
Les illusions, au placard à balai.
Ephraïm ne dira pas la vérité, mais il plantera des graines qui germeront un jour.
Que son compagnon demeure un agneau de Dieu.
- Toi aussi tu as droit à ta part de pureté.
Il touche l’épaule du garçon aux yeux brillants.
Enfant candide.
Comme au premier jour.
Qui boit ses mots.
Le fils du pasteur l’adoube.
L’agneau est terminé.
Chef-d’œuvre pastoral.
Les cloches annoncent le début de la messe.
Comme il l’avait prédit, c’est un discours de paix, d’amour, de renouveau.
Ephraïm entend à moitié les paroles du pasteur.
Elles sont trop entachées par sa propre amertume.
Le jeune homme regarde les fidèles écouter avec désarroi toute cette éloquence.
En avalanche.
Le sermon arrive à son terme.
- Allons distribuer les œufs.
Qu’il lance à tous les solidaires, à tous les bons paroissiens organisateurs de cette fête.
Des couleurs dans les mains.
Des regards curieux.
Il en reconnaît beaucoup d’entre eux.
Tourbillon de sourires échangés.
Un baume dans ce cœur chargé d’âcreté.

Spoiler:

coup de fil je me prépare à réparer des tuyaux non bonjour c'est le conseil pastoral voilà nous sommes tous bien occupés et il faudrait quelqu'un pour cacher les oeufs on a pensé à toi, abraham
abraham qui cache les oeufs ça aurait été vachement plus drôle qu'abraham qui sacrifie son fils non qu'en pensez vous auteurs de la bible ?
alors je dis rien de ma blague qui ne fait rire que moi et j'accepte. le conseil pastoral croit à un petit rire d'enthousiasme puisque jamais mes mots ne dépassent ma pensée.
c'est drôle comment ça fonctionne les hiérarchies dans l'église le conseil pastoral me tutoie d'emblée et moi je le vouvoie bien sûr je me permets de penser ça en narration parce que dans les faits on parle anglais et ce merveilleux YOU qui détruit les frontières de la domination empêche de se poser la question. que ce soit tu vous ou you on est toujours à la botte de quelqu'un, de toute façon.
alors cacher les oeufs. en réalité l'idée me plaît. c'est un truc de parent de cacher les oeufs je ne pensais pas en avoir l'honneur aussi tôt aussi dénué d'enfants. j'arrive guilleret comme un lapin à la paroisse et me voit confier le précieux panier. désolé abraham de te faire rater le prêche de pâques mais évidemment il faut que les enfants soient occupés ailleurs...je fronce les sourcils effectue toutes les moues en vigueur pour montrer que je suis navré de rater une messe aussi importante et c'est presque en gambadant comme un chien dans une pub royal canin que je fonce dans le parc qui entoure l'église. je me cache je les regarde tous rentrer dans la fraicheur du bâtiment glauque je me dis les pauvres. je vois le visage lisse d'ephraïm qui ne bouge pas malgré le roux qui le colle je les vois tous. une fois que je ne les vois plus je sors de ma cachette et je commence à en fabriquer pleins d'autres, des petites cachettes, pour les oeufs. je finis tout juste quand ils ressortent tous (oui c'est long je suis minutieux) et je me joins à la cohue comme si de rien n'était. ephraïm. je salue derrière son épaule pour un effet de surprise. je n'ai aucune idée de pourquoi je fais ça. j'ai la connerie parce que j'ai un secret. je sais aussi qu'ephraïm a repéré que je n'étais pas à la messe et qu'il ne sait pas pourquoi qu'il peut s'imaginer tout ce qu'il veut je sais ce qu'il s'imagine. alors ça m'amuse.
et puis je salue le roux d'un signe de tête parce qu'il est là et que ça se fait.

@ephraïm woolf @ambrose atkins

Ephraïm qui parle, c’était cette agréable sensation d’écouter des Evangiles : tout me parlait sans que je comprenais. J’agis comme devant son père, donc j’hoche la tête, comme si j’avais saisi. Tout ce que je retiens, c’est que je ne dois pas trop l’envier, et que j’ai ma part de pureté. Ma bouche se transforme en barre de fer horizontale, la même avec laquelle je frappe les hérétiques. Si ma lutte contre l’impureté était considérée comme Guerre Sainte, peut-être me sentirais-je moins sale avec les chaussures tâchées de sang. Pour le moment, mes mains étaient propres, mais l’idée de les utiliser m’effrayait. Je préférais les joindre dans un serment à la place. Je réponds rien à Jésus, parce que j’admets que je suis assez impressionné et que j’ose rien répondre. Je me contente d’un « hm » inutile du bout de la tête.

La messe traite de la trahison, de la mort, de la résurrection.
Mon rapport avec la foi était à la fois traditionnelle et purement égoïste. Si j’avais beaucoup de mal à admettre la seconde idée, je dirais qu’on se sent tous un peu proches de Dieu. A vrai dire, le personnage de Jésus me semblait plus intéressant. Si Dieu avait tout crée, je voyais en son Fils une entité plus remarquable, car plus présente dans ma vie. Si j’appréciais l’Église, c’est qu’on ne pouvait jeter personne du parvis. Si j’adorais passer de longues journées à prier ici, c’est qu’il faisait toujours bon dans son enceinte. On prenait soin de l’institution, on la fêtait. En y faisant part, j’espérais pouvoir m’y confondre.

Comme convenu, je vais distribuer des œufs avec Ephraïm, quand un drôle de gus vient nous parler. Je fronce les sourcils, parce que je me demande qui c’est. Je me vois mal demander un « t’es qui » en pleine journée sainte, alors que pendant d’autres temps, je l’aurais fais, vous vous en doutez bien. Je lui rends son signe de tête, et c’est là que je me retrouve troisième roux (roue, pardon) du carrosse. Je reste là comme un con, en me disant qu’on va sûrement préférer les œufs de Jésus, et que je comprenais.
Après tout, on pouvait bien se choper l’impureté sanguine avec des œufs pourris.

Abe le fait sursauter.
Il ne s’attendait pas à le voir débarquer après la guerre.
- Mon cher païen !
Accueil viking.
Regard éclairé par les cloches de Pâques et les lumières célestes.
Une tape dans le dos du mauvais bougre.
- Je ne t’ai pas vu assister à la messe. Une mission de la plus haute importance ?
Sourcils froncés.
Faussement accusateur.
Ephraïm remarque le panier dans les mains de l’impie.
Suspicion, toujours.
Les yeux un peu rétrécis, le doute au détriment de la confiance sans faille.
Il aime jouer avec son camarade.
Le détrôner.
Il continue nonchalamment de distribuer des œufs tandis qu’il s’adresse à ses deux compagnons.
Et faire semblant de sourire à l’assemblée.
L’apparence compte.
Ambrose ne répond que par borborygmes.
L’a-t-il déçu ?
Sûrement.
Il hausse les épaules.
Il ne veut pas tant l’épargner.
La vérité crue c’est plus facile à digérer.
- Ambrose, voici Abraham.
Présentation simple.
- Un ami, un fidèle aussi quand…ça lui chante.
Ironie sous-jacente.
Clin d’œil.
Ephraïm tente de reconnaître d’autres visages.
Émulation collective.
Les gens s’agglutinent autour d’eux.
Les enfants vont chasser les chocolats colorés.
Il inhale cette joie sereine.
Le corps enfin détendu.
Le pasteur est encore près de son autel.
Le carnage n’est qu’un bourdonnement lointain.
Il espère être le digne fils du prêcheur.
Il porte la tête haute.
Se donne une contenance qu’il n’a pas.

@Ambrose Atkins @Abraham Ringling

Spoiler:

La tradition veut qu'à Stevenson, à Pâques, on chante. Si Faye n'a pas le cœur à donner de la voix, elle n'a pourtant pas le choix. La chorale se produit pour l'événement (comme pour toutes les célébrations religieuses du village), et pas question de manquer de l'une des seuls sopranos capables de produire une mélodie juste : elle doit être là, on le lui a bien fait comprendre. Alors elle s'est pointée à l'église, à l'heure dite, et elle a chanté. Bien comme il faut, sans fausse note, mais sans trop de joie non plus, juste ce qu'il faut de gravité -- bien qu'un peu plus d'entrain aurait sans doute été apprécié, mais point trop n'en faut. Dans l'assemblée, il y a sa mère, toujours là quand il s'agit de faire bonne figure face aux braves paroissiens, et il y a sa fille, qui ne comprend pas bien ce qu'elle fait là, mais s'extasie de voir Faye sur scène : maman est une star, qu'elle pense sûrement. Si elle savait.

Après une messe solennelle, donc, le concert, et après le concert, la distribution de chocolats que l'enfant attendait, et certainement bien d'autres avec elle, car rares sont ceux qui peuvent se prétendre fervents pratiquants à Stevenson (même si tous aimeraient y prétendre). Faye retrouve sa famille, formant un trio récemment devenu inséparable, bon gré, mal gré. Ensemble, elles se dirigent vers le parc, où l'on annonce une chasse aux oeufs : sans surprise, Bonnie s'élance sans plus d'hésitation. Sa mère, elle, discute avec emphase avec une voisine. La messe était superbe, oh et ce sermon, quel homme, vraiment, ce pasteur. On lève les yeux au ciel du côté de Faye, laissée bras ballants. Des types en pleine distribution d’œufs viennent en sa direction : divine providence (blasphème). Parmi eux, elle reconnaît le fils du pasteur dont elle a oublié le nom, Ambrose, habituellement membre de la chorale, et un autre qu'elle n'a jamais vu. « Merci, » elle lance à leur intention. « Tu chantais pas aujourd'hui ? » interpelle-t-elle Ambrose, seul autre jeune membre de la chorale, et dont elle avait ressenti l'absence, soudain entourée seulement de choristes grisonnants. Faye pioche un œuf en chocolat et le plonge dans sa bouche. Sur son visage, l'air distrait de la jeune mère surveillant sa fille en pleine course au chocolat.

@Ambrose Atkins @Ephraïm Woolf @Abraham Ringling
Spoiler:

je le sais que ce n'est pas extrêmement civil de ma part de ne pas chercher plus avant à me présenter au roux. je suis un peu monotâche un peu sauvage malgré les apparences. ma solution au côté taciturne c'est de me mettre au coeur de l'action de me rendre indispensable. être homme à tout faire c'est aussi s'assurer d'avoir toujours des sujets tout trouvés. aucun effort à fournir. je suis là pour un but précis, on est là pour parler de choses précises ça ne va pas plus loin. je vois les yeux d'ephraïm sur le panier qui me trahit - quel con je vends la mèche le jeu ne peut pas aller plus avant je ne peux pas essayer l'église sans essayer le paganisme en parallèle ! pour se faire un avis il faut visiter les deux camps. je m'aperçois que mon côté taciturne vient de ce que toute ma vie il n'a autour de moi été question que de cirque. on n'a jamais vraiment parlé d'autre chose. et comme on tournait en rond sur le même sujet depuis des décennies hé bien on ne parlait pas. je me retrouve maintenant à parler de tout sauf de ça et c'est salvateur mais je n'ai pas encore les mots. les mystères souvent s'expliquent simplement. dieu bientôt je pourrai l'expliquer aussi simplement.
voilà que les politesses sont bien faites et que l'effort d'ouvrir la brèche avec le roux m'est épargné. enchanté, ambrose. content de pouvoir mettre un nom sur un visage. pourquoi je dis ça ? parce que c'est vrai - ouais ça se tient. est-ce que ce sont des choses qui se disent ? un sourire se dessine sur mon visage mon sourire de diablotin je le sais qu'il ressemble à ça je l'ai vu dans le miroir. fidèle quand ça lui chante, ça me plaît. je pose mon panier à terre pour éviter de faire croire aux gens qu'il est rempli d'oeufs je n'ai rien à distribuer que mon sourire à la con en échange de leurs yeux plissés qui cherchent à se rappeler où ils m'ont vus déjà ou se demandent pourquoi je n'étais pas à la messe.
on est interrompus par une jeune femme que je n'ai jamais vue. son sourire à elle ce n'est pas mon sourire de diablotin ridicule non c'est d'une douceur d'une douceur ce qui se passe là. pourquoi je ne l'ai jamais vue chanter puisque j'en déduis qu'elle fait partie de la chorale ? parce que depuis que je suis à stevenson je n'ai jamais écouté la messe avec autant d'attention, paradoxalement. je cherche absolument à m'accrocher à quelque chose, un mot du prêche, une odeur, une lumière divine, quelque chose pour me convaincre de continuer à me lever le dimanche matin, de laisser mes fauves seuls pour m'enfermer dans un bâtiment froid. je m'aperçois qu'elle aussi, je la regarde avec un peu trop d'attention alors qu'elle est en train de manger, et quoi de plus désagréable. alors apprenti sociable je tends la main. abraham welch. pardon pour ambrose pour qui je n'ai pas eu le courage de le faire. j'apprends au fur et à mesure.

On me présente, moi, des gens. J’esquisse un petit sourire un peu gêné. J’ai toujours rêvé me retrouver dans des troupes de jeunes cools et branchés.
Tout d’abord, il y avait Abraham. Je me méfie. Son nom m’évoque rien qui vaille. C’est un ami d’Ephraïm, donc je présume que ça doit être quelqu’un de bien, jusqu’à qu’il commence à ouvrir la bouche. Je soupire, considérant que la parole dessert tout de même pas mal les relations sociales. On devrait tous être muets, peut-être qu’on se taperait sur la gueule à force de mimer, mais on serait musclés et nos échanges seraient peut-être plus utiles. Par politesse, je hoche la tête et serre sa main.

« Enchanté » je lâche sobrement.

Je panique un peu, car une foule de gens comme ça autour de moi, c’est facile d’être le dindon de la farce. Je commence à regarder un peu, et je me sens un peu con. Je me dis qu’il fallait que je dise quelque chose, n’importe quoi, pour paraître moins mal à l’aise.
Faye débarque. Grande sauveuse, je la vois sur son cheval blanc invisible, bouclier à la main.
Et merde, je fais sauver par une gonzesse.
La honte.
Elle me demande pourquoi je chante pas. Comment te dire, Faye, que vos chants de gospel fait par des blancs grisonnants qui se déhanchent comme des blacks dans une église de campagne, ça me fout un peu la honte. Je m’étais tout simplement dégonflé, parce que j’avais proposé des trucs plus intéressants, et qu’on préférait les Amazing Grace. Le prolétariat et les ploucs de Stevenson m’étonneront toujours. Être pauvre ne rimait pas avec mauvais goût, on avait inventé les conservatoires depuis.

« Je suis tombé malade lors de la tempête … Un petit rhume, rien de grave ! Mais avoir la gorge prise quand t’es ténor ... » j’avais pas envie de ressembler vocalement aux vieux de mon pupitre, je faillis dire, mais je m'attache la langue avec un peu de bienséance.

Une demi-vérité, un demi-mensonge. J’avais en effet un petit rhume. Demi-mensonge : je passais ma vie avec de la fièvre, depuis que mon sang avait été contaminé par la chaleur des étreintes humaines. Fiévreux charnel à vie, c’était avec plaisir que je m’en serais tenu aux obligations de l’Église. Papa et maman m’avaient bien dit que jouer les rebelles, ça allait m’attirer que des ennuis.

« Mais bravo pour le concert, c’était … Très intéressant ! »

Je m’attendais à rien, et je détestais réellement le gospel dans les églises. Puis mon vieux rhume pouvait me buter, donc j’avais pas envie de le partager avec des vieux. J’étais dans la bénédiction de Dieu et dans l’amour du prochain, après tout.
Un peu rouge, par la honte et par le malaise, je me dis qu’il fallait que je m’ouvre et que j’arrête d’être passif. Si je voulais être un cool kid un jour, je me devais d’apprendre l’art et la manière de sociabiliser avec les gens de mon âge. On était peu de jeunes, alors autant se serrer les coudes.

« On a des couronnes de fleurs et des œufs … Vous en voulez … ? »

Je sens le MALAISE.

Abe, initié au paganisme ?
Maintenant, il l’imagine une plume dans les fesses.
L’image est cocasse.
Ephraïm esquisse un sourire moqueur.
- Je sais à quel camp tu es le plus fidèle, mon cher.
La conversation est vite expédiée par l’arrivée de la foule et d’une jeune femme.
Elle prend un œuf, les nargue.
Ephraïm écarquille les yeux.
Quelle impolitesse !
Il fait sans doute une grimace appropriée à la situation.
La bouche de travers, entrouverte.
Il l’a déjà croisée quelque part…
Elle parle de chant.
Liaison directe avec la chorale.
Ambrose se tortille à ses côtés.
Il est gêné.
Interrogatoire qu’il refoule.
Ou comment plomber l’ambiance festive en un instant.
- Moi c’est Ephraïm Woolf.
À l’intention de la demoiselle.
Présentation concise.
Il ne fait pas étalage, tout aussi peu adepte des codes sociaux.
À l’instar de son ami Abe qui tend une main fébrile.
Ils forment un quatuor de choc.
Pour sauver la mise, Ephraïm attrape des couronnes de fleurs dans un panier.
Il en enfile autour du cou de chacun.
Il sourit aux anges.
Ils sentent le printemps, tous.
- Est-ce que ça vous dit d’aller écrire sur l’agneau ?
On l’a peint avec Ambrose.
De la fierté.
Le pouvoir d’attirer l’attention ailleurs.
Autre que sur son camarade en proie à la panique.

Sans trop savoir comment, Faye se trouve entourée des trois jeunes hommes. Elle les regarde un à un faire leurs présentations, et elle se dit qu'ils sont bien mal assortis -- et pourtant, quelque chose semble les unir. Peut-être une lueur dans les yeux, qu'elle connaît pour l'avoir déjà vue dans les regards des garçons de leurs âges. Faye sent bien qu'entre eux se jouent des choses impalpables, qu'elle vient interrompre en mâchonnant un chocolat de pâques - sont-ils sacrés, eux aussi ? - comme un vulgaire chewing-gum.
Tour à tous, donc, ils lâchent leurs noms, sur un ton aussi peu enjoué que s'ils devaient aller à confesse. Deux mots, pas plus, lui seront adressés par chacun d'entre eux, dans une attitude sérieuse qui les vieillit de manière soudaine. La légèreté, si jamais elle a été de la partie, semble définitivement s'être envolée. « Moi c'est Faye, » elle lâche, négligeant jusqu'à son patronyme, contraste saisissant avec leurs introductions raides et peu enjouées.

Ambrose prend le relais, justifiant son absence tant bien que mal. Faye hausse les épaules, l'air de dire : peu importe. Il faut avouer que son attachement à la chorale de Stevenson est moindre, et que si on l'avait laissée faire, elle n'aurait certainement pas poussé la chansonnette aujourd'hui non plus. « Tu parles, c'était pas terrible. Les solos de Madame Keller... il faudrait les interdire. » elle lâche dans un petit rire, en référence à cette choriste à l'entrain certain, que même les moues moroses du chef de chœur n'ont su entamer. Entourée d'eux, elle se sent un instant ramenée à l'époque où elle était la fille en vue du village, la blonde aux yeux de biche qui allait faire carrière de par le monde. La sensation est grisante, bien vite rattrapée par le vouvoiement de son interlocuteur. Elle le note, sans le relever verbalement. Coup de vieux.

« Je veux bien une couronne ! » réplique-t-elle d'une voix juvénile : quitte à jouer les nostalgiques, autant y aller jusqu'au bout. Le fils du pasteur s'exécute promptement, avant de détourner la conversation. Du bout des doigts, désigne l'agneau pascal. Faye jette un coup d’œil en direction de sa fille. « Je vais rester ici, je dois surveiller... » elle la désigne du menton quand les mots ne franchissent pas ses lèvres. Le retour à la réalité est rapide. Il semblerait que les couronnes de fleurs ne durent qu'un temps.

aucun d'entre nous n'a l'air à l'aise. tous coincés par une chose ou par une autre on essaye de faire semblant qu'on est adultes et qu'on sait se comporter en société, être intéressant, passionnant même, prendre le centre de l'attention. ambrose se débat dans la mélasse sollicité qu'il est par tout le monde. je le regarde et je l'imagine chanter dans la chorale de l'église. j'ai un peu envie de rire à cette image mais je retiens mon impulsion à l'aide d'une moue inspirée et me tourne vers ephraïm envers qui ça pourra toujours passer pour de la provocation. et oui : je suis fidèle à mon camp ! je regrette aussitôt cette phrase complètement nulle à chier. à mon tour de me débattre dans la mélasse entre les différents visages et les pensées immédiatement censurées qui traversent mon esprit à toute blinde. qui d'autre qu'ephraïm pour être la providence et me tirer aussi sec de mon embarras en détournant complètement le sujet ? le fils de pasteur est prophète. s'il me fallait croire en quelque chose, là tout de suite, je croirais en ephraïm.
oui. même s'il vient de m'enfiler un collier de fleurs ridicule autour du cou. parce qu'à nous tous avec nos colliers de fleurs on annonce de loin notre nullité absolue. on la maquille. on fait partie de l'événement, on n'a rien à dire mais on est vip quand même (mais n'est-ce pas, d'ailleurs, le principe des vip ? à réfléchir plus avant quand je serai au calme avec pip et joe).
faye se détache immédiatement de notre groupe de looser en utilisant comme prétexte...sa fille. c'est absurde mais je n'ai jamais vraiment rencontré de femme mère aussi jeune. les femmes au cirque attendent d'être moins agiles à leurs agrès avant de tomber enceintes, pour ne pas perdre de temps. c'est un truc qui ne me viendrait même pas à l'idée pourtant dans les milliers de publics que j'ai vu passer j'ai dû en voir des tonnes. elle a quel âge ? je ne peux pas m'en empêcher. j'essaye de ne pas lui signifier que je lui demande comme si elle était une bête curieuse parce que c'est moi qui aurait l'air d'une bête curieuse si elle s'en rendait compte. je le sais pourtant que c'est parfaitement banal d'avoir des enfants à cet âge. plus jeune, même : que le phénomène de fille mère par exemple travers l'Amérique entière.
je ne sais pas ce qui me prend mais pour me donner une contenance je souris à ambrose, à ephraïm. tout-va-bien.

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